Loin de la neige, du froid et du verglas. C'est tout près de Johannesburg, enAfrique du Sud, que Mahiedine Mekhissi s'entraîne, depuis plusieurs semaines - avec d'autres membres de l'équipe de France -, sous 35 °C. "C'est la quatrième fois que je viens ici, raconte-t-il, c'est classe !" Classe. Voilà un mot qu'il répète souvent. Car depuis qu'il a remporté sa deuxième médaille d'argent aux Jeux de Londres sur 3 000 m steeple, le coureur trouve qu'il a pris une autre dimension.
En août 2012, dans sa ville de Reims, quand son club de football a affronté Marseille pour son premier match de la saison, on a pensé à lui pour le coup d'envoi. "Quel honneur, ça faisait trente-trois ans que Reims n'avait pas joué enLigue 1, souligne-t-il. Je peux aller au stade quand je veux, c'est classe... On m'a même proposé de m'entraîner avec l'équipe." D'ailleurs, dès qu'il le peut, il porte le maillot rouge et blanc floqué à son nom. Dans les rues rémoises ou parisiennes, on le reconnaît. "Et d'ailleurs, ça m'oblige à faire attention à mon image, souligne-t-il. Je n'aurais jamais imaginé que ça serait à ce point-là."
CHANGER DE COACH
Mahiedine Mekhissi parle comme un petit garçon, "toujours sur mon nuage",comme il dit, depuis qu'il a prouvé au monde entier qu'il était le seul capable debattre, sur le tartan, les Kényans. Mais pas de triomphalisme. Pas de nuit blanche ni de boîte de nuit. Le garçon de 27 ans a savouré sa médaille d'argent en famille, dans le pays de ses parents, en Algérie. Au calme. "Après les Jeux, je n'ai rien fait pendant un mois et demi, raconte-t-il. J'ai juste profité." Pas question pourtant de trop "se relâcher". "Je sais que les Kényans sont les meilleurs, et après Londres, ils sont déjà retournés au charbon", argue le coureur.
Après six semaines à souffler, Mahiedine Mekhissi a repris l'entraînement... seul pendant deux mois. Le Rémois a dû changer de coach. Il n'est plus suivi par Farouk Madaci ; les deux hommes - qui ont vécu quasiment 24 heures sur 24 ensemble pendant des années - ont préféré mettre fin à leur collaboration. Début décembre 2012, en préparation au Portugal, le patron du demi-fond français, Philippe Dupont, est venu lui rendre visite. "Je lui ai dit : "Je veux m'entraîner avec toi, Philippe." Il n'a pas dit non, je l'ai considéré comme mon coach."
Mahiedine sent déjà les changements : "Il m'apporte de la sérénité, de la sagesse", raconte le coureur, qui pense déjà au mois d'août et aux championnats du monde à Moscou.
Et comme une obsession, Mahiedine Mekhissi n'arrête pas de parler des Jeux de Rio, en 2016, et de conquête du titre suprême. "Il me reste quatre années, quatre années à m'entraîner dur, à peaufiner les détails, quatre années de sacrifices,martèle-t-il. Je suis double vice-champion olympique, double champion d'Europe, 3e au championnat du monde. On me demande quelle est ma source de motivation : je n'ai pas gagné un grand titre international." Un titre mondial pourcommencer, ça serait classe, non ?